Dans le cadre de la découverte de notre héritage antique gréco-romain (Homère, Virgile, Ovide), les classe de 6A et 6B ont rédigé un récit épique de la rentrée. Des notes vous permettent de mieux comprendre le sens des choix stylistiques.
Mme Carrier, professeur de français
Portrait imaginaire d’Homère (Musée du Louvre, Paris)
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Sujet : raconte, à la première personne(1) et au passé composé, les premiers jours au collège, en classe de Sixième. Adopte un style épique(2), en employant des épithètes homériques(3) et le champ lexical du vent(4) pour traduire ton sentiment d’être un héros essuyant une tempête. Contrainte supplémentaire : la rédaction comportera 6 étapes x 4 phrases = 24 phrases(5).
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Le jour de la rentrée en Sixième, lorsque j’ai pénétré dans la cour du lycée français St Louis, j’ai senti une bouffée d’anxiété me serrer la gorge. Heureusement, j’étais bien décidé à surmonter tous les obstacles. J’avais erré tout l’été, en espérant retrouver mes compagnons au courage sans pareil. Un périlleux voyage nous attendait et une puissante bourrasque nous a soudainement emportés au milieu d’un couloir infini…
Moi, malheureux, je désirais éperdument atteindre le casier où se trouvaient mes précieux manuels, mes cahiers aux pages blanches et ma plume à l’encre dorée. Hélas ! Ma clef diamantée avait disparu et un vacarme infernal emplissait ce maudit couloir aux mille dangers. Un blizzard violent m’a poussé d’un côté puis de l’autre, me bousculant, me faisant trébucher, et m’empêchant finalement de me munir de mon équipement.
Immobile sur les berges de l’île 210, je l’ai vue, Carrypso(6) aux boucles noires, la déesse de la lecture à la silhouette divine. Je pouvais lire la terreur sur le visage de mon équipage, d’autant plus que le poids de notre fardeau nous empêchait de lutter contre les vents contraires. Un vif courant d’air a claqué la porte : nous étions prisonniers. Periphème (7) au grand cœur et aux muscles saillants, notre unique espoir d’échapper à cette nymphe maléfique, ne se manifestait pas.
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Quelque temps plus tard, naufragés dans une mer d’incertitude, une tornade glacée nous a enveloppés. Lorsque la brume s’est dissipée, j’ai entendu une voix grondante s’élever : dans un tourbillon de mots et de gestes, Bennanein(8) à la forte voix s’entretenait avec Hametos(9) au vieil atlas. Quelle épreuve allions-nous encore affronter ? Où se trouvait notre chère Cornesicaa(10) au regard ensorcelant, fille des Vikings à la jeunesse éternelle ?
Brusquement une tempête de multiplications et de divisions s’est déchaînée : Chaillueton(11) au compas acéré nous attendait, armé d’une équerre pointue et d’une règle tranchante. Nous avons invoqué en vain Labarbséidon(12) à la plante carnivore : nous étions seuls face à ce nouveau péril. Notre sagacité et notre bravoure nous ont heureusement permis de déjouer les pièges de ce monstre mathématicien. Lorsque cette rafale arithmétique s’est éloignée, mes valeureux compagnons et moi-même avons enfin pu regagner le rivage sains et saufs.
Après ce périple harassant, je suis rentré dans mon foyer, pour raconter mes exploits et poursuivre mon dur labeur. Mon équipement pesait sur mes épaules lasses, mais une douce brise rafraîchissait mon visage fatigué, et me permettait d’envisager avec sérénité cette nouvelle année. Ô dieux tout-puissants ! Inspirez-moi de votre souffle divin…
Mme Carrier et les élèves de 6A et 6B
1. Dans les chants IX à XII de L’Odyssée d’Homère, le narrateur cède la parole à Ulysse qui raconte lui-même les aventures qu’il a vécues depuis son départ de Troie.
2. Un récit épique mêle la légende à l’histoire en mettant en scène un héros aux prises avec des forces qui le dépassent.
3. Une épithète homérique est une formule poétique qui caractérise, dans l’épopée, les dieux, les humains, les animaux, les lieux et les choses.
4. Ulysse erre d’île en île dans la mer Méditerranée pendant dix ans, et essuie plusieurs tempêtes déclenchées par Poséidon qui l’a maudit.
5. L’Odyssée est un long poème constitué de 24 chants, qui comporte environ 12000 vers.
6. Carrier + Calypso
7. Per + Polyphème
8. Bennani + désinence de l’infinitif
9. Hamet + suffixe -os des noms masculins
10. Cornelia + Nausicaa
11. Cailluet + Charon
12. Labarbe + Poséidon
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